Ma pratique de l’image photographique se construit en plusieurs temps.
Le premier consiste à chercher un lieu, souvent d’accès non libre, me permettant de constituer une archive sur des périodes de prise de vues assez longues (plusieurs années) . Ces lieux – qu’ils soient des carrières en activités ou des chantiers en rénovation – sont structurellement en pleine mutation, provoquant là même une radicale confrontation des temps. Le vécu, l’immersion voire l’épuisement du lieu sont à la base de mes photographies. Ces explorations photographiques aboutissent à l’exposition d’un ensemble d’images in situ en collaboration avec les acteurs du lieu. L’exposition permet ainsi non seulement la confrontation directe des images au lieu mais aussi, parfois, la mise au jour en accès libre de celui-ci. La résistance du réel, la résistance de la matière organique ou minérale à la transformation, le bouleversement des matériaux, des formes, renvoient à la dimension ontologique de l’image, interroge la mémoire, le rapport à nos «ma-patrimoines» naturels, historiques, personnels.
Le deuxième temps, correspond à un travail décontextualisé en atelier et questionne le medium photographique lui-même. À partir de la matière première photographique imprimée et contrecollée, je me confronte non plus à la réalité mais à sa représentation. J’engage alors un travail plastique sur les images. et procède à une délamination par endroit, de la couche supérieure imprimée du papier. Le délaminage fait apparaître l’aspect cotonneux du papier, ancre l’image dans une réalité physique d’objet. Un aller retour entre l’image objet et l’objet photographié se crée.
Suivant les sources de lumière et le déplacement du spectateur, l’image disparaît laissant exister de nouvelles formes, une tension entre mémoire du réel et abstraction. L’ambition d’un synthèse entre le photographique, le sculptural et le pictural.
————————————————————–